Le fond de la mer, nager en toute quiétude, pêcher des crustacés, admirer les beautés de la création, photographier des requins de plusieurs tonnes dans les eaux australiennes en totale sécurité dans une cage...
Des vacances idylliques ! ...
Votre aventure va se dérouler au fonds de la mer, là où les humains d’habitude nagent en toute quiétude, pêchent des crustacés, ou admirent les beautés de la création.
Seulement, comme rien ne se passe jamais comme prévu dans une aventure, vous allez devoir nager, nager, et nager encore. Le stress, la pression, ou la présence de quelques créatures affamées vont, probablement, vous inciter à nager toujours plus, toujours plus vite, et plus longtemps.
Vos décisions vont avoir un impact sur votre rythme cardiaque, qui lui-même aura un impact sur votre aventure.
Plus le stress ou l’effort physique accompli, sera important et plus il sera difficile d’être habile. De plus vos blessures saigneront d’avantage, ce qui causera plus de perte d’endurance.
Si votre total d’endurance tombe à zéro, l’aventure s’achève.
Bonne chance ...
Si vous voulez approcher celui qui fait couler le plus d’encre, il faudra vous rendre dans le sud de l’Australie, à Port Lincoln. Cette ville australienne est en effet le point de départ pour observer les grands requins blancs dans une cage immergée. Le requin blanc, ou «Great White Shark» est un des poissons les plus dangereux au monde… les sensations fortes sont garanties?!
Quand vous aviez lu cette publicité, l’activité vous avait semblé originale, même irrésistible. Faire des selfies dans une cage, au fond de l’océan, entourée de ses mangeurs d’hommes. « C’est une formidable aventure à vivre ! », pouvez-vous encore lire au verso.
Bon, dans ce cas si c’est le genre de sensations qui séduit tout le monde, pourquoi hésiter ?
Le problème, est qu’une fois sur place vous avez vite déchanté. Le temps dans cette région, à cette période de l’année, est abominable. Il pleut des trombes d’eaux depuis deux jours. Vos amis, en couple, restent dans leur chambre. Incapable de supporter de rester enfermée, vous vous êtes dit qu’il fallait sortir. Les vacances n’allaient pas se limiter à admirer un temps exécrable par la fenêtre, parce que çà, vous pouviez très bien le faire en France.
Bref, vous avez décidé de bouger. La vie est courte. Vous vous êtes résolue à payer l’option « plongée pour de grandes sensations ». Le moment venu, le hall de l’hôtel aurait dû être rempli d’amateurs. C’était l’occasion de nouer de nouvelles connaissances, d’avoir de nouveaux « amis-facebook ».
Seulement, il n’en sera rien. Non, personne d’autre ne s’est inscrit.
Quelques heures plus tard, vous êtes en mer. Seulement le temps ne se calme pas, la grande Baie australienne est agitée, très agitée.
Vous avez du mal à supporter le mal de mer. Pour couronner le tout, le « Toucan volant », bateau de luxe classé 5 étoiles, qui devait vous emmener vers la « grande fosse », là où se regroupent les squales, est en réalité un vieux rafiot dévoré par la rouille. Une épave !
Vous vous demandez d’ailleurs s’il est réellement prudent de continuer quand vous voyez une énorme vague dépasser la hauteur de ce radeau de la méduse. Vous vous accrochez à un garde-corps, vous fermez les yeux. Un mur d’eau sale se déverse sur le pont avant de vous fouetter le visage. Vous dégoulinez du sommet du crâne jusqu’aux pieds. L’odeur de la marée se mélange à celle du kérosène qui s‘échappe de sous la barcasse.
Le capitaine et ses deux sbires éclatent de rire en voyant votre mine… En baragouinant un peu d’anglais, vous comprenez que vous leur donnez l’impression d’être un cadavre tellement votre mine est blanche. Ça doit être drôle en effet …
Quelques minutes plus tard, votre somptueuse galère s’arrête enfin. La chance a l’air de tourner, les nuages s’éclaircissent, seul un petit crachin tombe désormais sur votre tête.
Le capitaine crache sur le pont avant de vous lancer : « perfect time ! »
Ses deux caboteurs s’activent immédiatement à monter et visser la fameuse cage que vous avez vue dans un fameux film des années soixante-dix. Elle est à l’image du bateau : décolorée par la rouille. Un mauvais pressentiment vous démange. Vous voudriez leur dire que tout compte fait, vous pourriez remettre la sortie à plus tard. L’eau à la surface reste noirâtre. Un crissement de coque stresse vos oreilles en même temps que celles du capitaine. Il s’avance vers une fissure du pont. Il s’agenouille en l’examinant. Il s’essuie le front en se retournant vers l’un de ses gars. Il le pointe du doigt avant de faire un mouvement de son pouce sous son cou comme s’il voulait l’égorger. L’intéressé lâche la partie de la cage qu’il était en train de visser, s’avance furieux vers son chef, et les deux lascars comment à se hurler dessus, de manière assez peu courtoise, manifestement. Même sans maîtriser la langue de Shakespeare, vous entendez parfaitement les tombereaux d’injures qu’ils se lancent l’un et l’autre.
Cette accumulation de signes ne vous dit rien qui vaille. Trop tard, la cage est prête. Le dernier gaillard a terminé de la visser.
Il l’attache à une espèce de treuil, lui-même rattaché en perpendiculaire au mat. Il tourne un curieux volant orange de rouille pour la faire s’élever et pivoter du côté de la mer, avant de la faire tomber sans ménagement dans l’eau.
Un des types vous montre par gestes comment y entrer par la trappe du haut restée ouverte, et comment ensuite il va la fermer avec un cadenas pour bien fixer l’ensemble. Le capitaine hurle alors quelque chose, avant de tapoter la montre à son poignet. Il vous fait comprendre par grimaces que vous avez droit à 15 minutes, et après ils vous remontent.
Quinze minutes d’activité, pour une heure d’attente, et une autre heure à manquer de vomir votre petit-déjeuner, avec la même chose a retour……
Quelles vacances !
Vous faite un signe de tête pour marquer que vous avez compris. Vous enfilez rapidement votre équipement de plongée. Vous enjambez le bastingage. Avec vos palmes vous manquez de tomber, mais heureusement non, vous réussissez à entrer dans la cage sans trop de stress, avant d’être dans cette eau croupie. Elle est froide, apparemment encore plus sale que la vague de tout à l’heure. Vous ressentez l’envie de bouger face au froid qui vous congestionne. Lorsque votre masque est bien ajusté, vous essayez le détendeur de plongée.
Tout va bien, vous respirez normalement.
Le plus grand des gaillards du capitaine vous montre le petit câble dans votre dos, où se trouve le nanomètre. Vous y lisez que vous avez à peine une demi-heure d’oxygène. Radins jusqu’au bout des ongles, vous dites-vous. Il vous montre également à votre ceinture que se trouve un couteau, une lampe de plongée. Enfin il vous tend la caméra avec laquelle vous allez pouvoir filmer votre aventure.
Vous avez juste le temps d’opiner du chef, que son petit acolyte est déjà en train de refermer la cage au-dessus de votre tête. Vous vous laissez tomber dans la cage, entièrement sous l’eau.
C’est parti. Il ne vous reste plus à présent qu'à profiter de ce quart d’heure sous-marin.
Et maintenant...